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Le terme sémiologie a été créé par Emile Littré et pour lui, il se rapportait à la médecine[1]. Il a ensuite été repris et élargi par Ferdinand de Saussure, pour qui la sémiologie est « la science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale » (Cours de linguistique générale, p. 33). Le terme sémiotique, inventé par Charles Sanders Peirce quelques années auparavant, recouvre la même idée et est utilisé le plus fréquemment en dehors de France.

Toute science étudiant des signes est une sémiologie. Le terme est donc utilisé dans plusieurs disciplines.

La sémiologie (du grec « séméion », le signe, et logos, “discours”, “raison”, “étude”) apparaît être une discipline récente. En linguistique, la théorie générale des signes n’est pas nouvelle puisqu’on la rencontre chez des auteurs comme Court de Gébelin ou Joseph-Marie de Gérando.


Tombée presqu’un siècle dans l’oubli, la publication du Cours de linguistique générale de
Ferdinand de Saussure propose d’en renouveler la définition, ou plutôt d’en circonscrire le champ d’étude : « On peut donc concevoir une science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale ; elle formerait une partie de la psychologie sociale, et par conséquent de la psychologie générale ; nous la nommerons sémiologie. Elle nous apprendrait en quoi consistent les signes, quelles lois les régissent. Puisqu’elle n’existe pas encore, on ne peut dire ce qu’elle sera ; mais elle a droit à l’existence, sa place est déterminée d’avance. La linguistique n’est qu’une partie de cette science générale… » (de Saussure, 1972 [1916], p. 33).

On assiste alors à un regain d’intérêt pour l’étude des signes, et la sémiologie devient une nouvelle discipline dans les Sciences sociales avec des auteurs comme Greimas, Barthes, Jean Baudrillard, Mounin ou Umberto Eco.

Cette définition sera progressivement étendue à d’autres champs que la philologie pour devenir une science générale de la communication. Ainsi, Buyssens s’est proposé de définir la sémiologie comme « la science qui étudie les procédés auxquels nous recourons en vue de communiquer nos états de conscience et ceux par lesquels nous interprétons la communication qui nous est faite » (Buyssens, 1943, p. 5). Cette définition, très emprunte d’individualisme méthodologique, sera vite dépassée par la conception de Greimas qui envisage la sémiologie dans toute sa dimension culturelle et comme un fait social total.

Aujourd’hui, le second sémiotique prédomine. Il fallait donc que le premier se cantonne dans un sens plus spécialisé ; ce fut celui de la description spécifique de systèmes de signes particuliers. Pour Hjelmslev, la sémiologie est une sémiotique dont le plan du contenu est lui-même une sémiotique. Cette distinction est d’une certaine manière reflétée ici. D’une démarche plus consciente, nous avons voulu, dans l’expression « système sémiologique » par exemple, introduire entre sémiotique et sémiologique la même nuance que celle qui existe entre phonétique et phonologique : une nuance entre la science de la substance et celle de la forme.

“DEUX ÉCOLES EN SÉMIOLOGIE. Sémiologie de la Communication et Sémiologie de la signification. 1) La sémiologie de la Communication étudie uniquement le monde des signes, par exemple l’étude des systèmes de vêtements de deuil ou de la canne blanche de l’aveugle (système à un seul signe ou signe isolé). Représentants éminents : Georges MOUNIN, Éric BUYSSENS, Louis PRIETO. La sémiologie de la Communication a étudié : le code de la route, les signaux ferroviaires maritimes et aériens, le morse, les sonneries militaires, les insignes, les langages machine, la notation musicale, le langage de la chimie, des ordinateurs, les langues parlées, sifflées, le tam-tam… 2) La sémiologie de la Signification n’a pas d’a priori, elle étudie signes et indices, sans se préoccuper de la distinction. Représentant : Roland BARTHES créateur du courant. Elle s’intéresse à tout ce qui signifie quelque chose sans se préoccuper si cela est volontaire ou pas. Interprétation de phénomènes de société, elle cherche si les choses n’ont pas un sens caché, des valeurs symboliques par exemple le combat bien/mal chez les catcheurs. Le combat à un rôle de catharsis. Elle s’est occupé d’analyse de pubs, des notions impliquées dans le langage. – Conscient, conventionnel, précis : sémiologie de la communication. Univers du sens caché, sans rigueur, non conventionnel : sémiologie de la Signification. – D’après le cours de C. Maury-Rouan, Langage et Communication.”

Sémiologie médicale [modifier]

Article détaillé : sémiologie médicale.

C’est pour la médecine que ce terme a été inventé par Emile Littré. La sémiologie médicale est la partie de la médecine qui étudie les symptômes et signes et la façon de les relever et de les présenter afin de poser un diagnostic.

Sémiologie en géographie [modifier]

On parle également de sémiologie en géographie. Elle y est utilisée comme “technique” d’interprétation ou de traduction. En particulier, la géographie s’intéresse non seulement à la sémiologie générale, mais aussi à la sémiologie graphique : par exemple, l’étude de la pertinence des représentations de l’espace (notamment cartographiques) et des groupes sociaux qui les peuplent (représentations paysagères, processus de construction de l’identité, etc.) utilise le cadre conceptuel de la sémiologie graphique.

Sémiologie visuelle [modifier]

La sémiologie visuelle ou sémiotique visuelle a été particulièrement développée dans les travaux du Groupe µ, et spécialement dans l’ouvrage fondamental qu’est Traité du signe visuel (1992). Cet ouvrage part des fondements physiologiques de la vision, pour observer comment le sens investit peu à peu les objets visuels. Il distingue d’une part les signes iconiques (ou icônes), qui renvoient aux objets du monde, et les signes plastiques, qui produisent des significations dans ses trois types de manifestation que sont la couleur, la texture et la forme. Il montre comment le langage visuel organise ses unités en une véritable grammaire. Une telle grammmaire permet de voir comment fonctionne une rhétorique visuelle, au sein d’une rhétorique générale.

La sémiotique visuelle est une branche de la sémiotique. Elle étudie des objets de signification se manifestant sur le canal visuel, et au premier rang de ceux-ci, l’image, ou, en termes plus techniques, l’icône visuelle. Elle étudie ces phénomènes comme autant de langages. Dans une société des images, il y a certes urgence à ce qu’existe une telle théorie de la communication visuelle. Or, alors que depuis l’Antiquité, on a beaucoup spéculé sur le langage, les débuts d’une réflexion scientifique sur l’image ne datent guère que du XVIIIe siècle.

Naissance de la sémiotique visuelle [modifier]

À proprement parler, on ne peut parler de sémiotique visuelle, une sémiotique ne se définissant pas par une sensorialité (à ce compte là, il y aurait une « sémiotique auditive » qui étudierait à la fois la musique et le langage). Mais la sémiotique visuelle a eu pour tâche de se pencher sur des phénomènes qui n’avaient été approchés jusque là que par la critique d’art ou l’esthétique.

Au début de son existence, dans les années 1960, la sémiotique visuelle a d’ailleurs peiné à se dégager du domaine de la critique et de la spéculation esthétique, même si elle a connu quelques avancées avec la sémiologie graphique.

Différentes écoles [modifier]

Dans les années 1980, elle s’est développée spectaculairement, avec les travaux de l’école de Montréal (Fernande Saint-Martin), de l’école sémiotique de Paris (Jacques Fontanille) et surtout ceux de l’école de Liège (Groupe µ), ou encore avec les travaux de Göran Sonesson.

La sémiotique visuelle a été particulièrement développée dans les travaux du Groupe µ, et spécialement dans l’ouvrage fondamental qu’est Traité du signe visuel (1992). Cet ouvrage part des fondements physiologiques de la vision, pour observer comment le sens investit peu à peu les objets visuels. Il distingue d’une part les signes iconiques (ou icônes), qui renvoient aux objets du monde, et les signes plastiques, qui produisent des significations dans ses trois types de manifestation que sont la couleur, la texture et la forme. Il montre comment le langage visuel organise ses unités en une véritable grammaire. Une telle grammaire permet de voir comment fonctionne une rhétorique visuelle, au sein d’une rhétorique générale.

Développement de la discipline [modifier]

La sémiotique visuelle a donc pu contribuer à aborder de grands thèmes de la sémiotique tout court, comme celui de l’icône, déjà abordé par Umberto Eco, ou celui de la valeur des signes plastiques comme la couleur.

La discipline qu’est la sémiotique visuelle est surtout pratiquée dans les Départements de communication, d’histoire de l’art, de design et d’architecture ; elle est stimulée par l’existence d’une Association internationale de sémiotique visuelle, dont la revue officielle s’intitule Visio.

 

 

Sémiologie de la photographie [modifier]

Pol Corvez (sémiologue à l’université d’Angers) travaille sur la sémiologie de la photographie. Au lieu de se fonder sur les référents, comme le font les typologies traditionnelles, il se fonde sur le repérage et l’analyse des signifiants propres à la photographie et aux arts graphiques et propose une typologie des Å“uvres photographiques. Il appelle cette nouvelle discipline la «photologie ». Cette typologie comprend quatre classes : le Clinique, le Mythique, le Déixique et le Morphique. Sa thèse La photologie : pour une sémiologie de la photographie, est consultable dans les bibliothèques universitaires.

Sémiologie du cinéma [modifier]

La sémiologie du cinéma a notamment été développée par Christian Metz.

Sémiologie de la musique [modifier]

Article détaillé : sémiologie de la musique.

Dans les années 1970 Jean-Jacques Nattiez et Jean Molino publient les textes de base de la sémiologie de la musique « Fondements d´une sémiologie de la musique » et « Fait musical et sémiologie de la musique ».

La sémiologie de Molino et Nattiez se base sur deux triades :

  • la notion de tripartition des formes symboliques et
  • la conception triadique du signe développée par Charles Sanders Peirce.

La tripartition de Molino et Nattiez soutient que toute oeuvre musicale peut être abordée de trois points de vue :

  • le niveau poïétique (point de vue de la production),
  • le niveau esthésique (point de vue de celui qui reçoit le message musical) et
  • le niveau immanent de l´œuvre (niveau neutre, l´ensemble des configurations du texte musical).

L´originalité de la tripartition de Molino et Nattiez est l´affirmation de la non-convergence des ces trois niveaux.

Structuralisme

L’approche structuraliste du langage de l’art trouve son origine dans la linguistique de Ferdinand de Saussure et dans l’anthropologie structurale de Claude Lévi-Strauss.

Esthétique analytique

La philosophie analytique se confond au départ avec une philosophie du langage, et développe une approche originale de l’art (notamment contemporain) à partir de catégories linguistiques telles que la métaphore ou le jeu de langage.

  • Ludwig Wittgenstein (1889-1951)
    • Investigations philosophiques, 1949
    • Leçons et conversations sur l’esthétique, la psychologie et la croyance religieuse, trad. fr. Gallimard 1992
  • Nelson Goodman (1906-1998), Langages de l’art, 1968
  • John Searle (1932-), Sens et expression, ch. IV : « La métaphore », 1982
  • Umberto Eco (1932-)[1]
    • Lector in fabula ou la Coopération interprétative dans les textes narratifs, 1979
    • Sémiotique et philosophie du langage, 1984
    • Les Limites de l’interprétation, 1990
  • Umberto Eco (dir.), Histoire de la beauté, Flammarion, 2004

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Herméneutique [modifier]

  • Martin Heidegger (1889-1976)[2]
    • « L’origine de l’oeuvre d’art » (dans Chemins qui ne mènent nulle part), 1950
    • Acheminement vers la parole, 1959, trad. fr. Gallimard 1976
    • Approche de Hölderlin, 1962
  • Mikhaïl Bakhtine (1895-1975), L’Å“uvre de François Rabelais et la culture populaire au Moyen Âge et sous la Renaissance, 1965
  • Hans-Georg Gadamer (1900-2002)
    • Vérité et Méthode, 1960, trad. fr. Seuil, 1996
    • L’art de comprendre. Écrits I : herméneutique et tradition philosophique, trad. fr. Aubier, 1982
  • Maurice Blanchot (1907-2003)
    • L’espace littéraire, 1955
  • Paul Ricoeur (1913-2005)[3]
    • La métaphore vive, 1975
    • Du texte à l’action. Essais d’herméneutique II, 1986
  • Hans Robert Jauss (1921-1997)
    • Pour une esthétique de la réception, trad. fr. Gallimard 1975
    • Pour une herméneutique littéraire, trad. fr. Gallimard 1988
  • Jacques Derrida (1930-2004)
    • L’écriture et la différence (1967)
    • La dissémination (1972)

Voir aussi [modifier]

Article connexe : Sémiologie.

Article connexe : Herméneutique.

Article connexe : Sémiologie de la musique.

Article connexe : Bibliographie d’esthétique.

Article connexe : Bibliographie d’histoire et de théories de l’art.

Notes et références [modifier]

  1. ↑ Umberto Eco s’inspire à la fois de la philosophie analytique et du structuralisme dans sa sémiologie de l’art. Il reprend aussi la tradition herméneutique qu’il critique.
  2. ↑ Martin Heidegger est sans doute le fondateur de l’herméneutique de l’art. Cette approche sera rangée dans la catégorie « philosophie continentale », par opposition polémique avec la « philosophie analytique ». On peut voir comme précurseur de l’herméneutique heideggerienne les deux livres Herméneutique (trad. fr. Le Cerf, 1987) et Esthétique (trad. fr. Le Cerf, 2004) du philosophe et théologien Friedrich Schleiermacher.
  3. ↑ Paul Ricoeur est également un grand lecteur des philosophes autrichiens et anglo-saxons, comme par exemple Ludwig Wittgenstein et Max Black.

La Chambre claire : Note sur la photographie est un livre de Roland Barthes, publié en 1980, dans lequel celui-ci s’interroge sur la nature et l’essence de la photographie. La Chambre claire, par opposition à la chambre noire où l’on développe la photo, est un éclaircissement, une philosophie, selon Roland Barthes. Celui-ci reste abasourdi par une photo de 1852 représentant le dernier frère de Napoléon. Il se dit alors : « Ces yeux ont vu l’Empereur ! ». Puis la photographie culturelle l’éloigne peu à peu de cet étonnement. Il veut cependant savoir ce que la photographie est « en soi », si elle dispose d’un « génie » propre. En tout cas elle reproduit à l’infini, mécaniquement, ce qui n’a lieu qu’une fois. Elle ne peut être transformée philosophiquement. Percevoir ce qu’elle signifie n’est pas impossible si l’on fait appel à la réflexion.

Les photos qui intéressent Roland Barthes sont celles devant lesquelles il éprouve plaisir ou émotion. Il ne tient pas compte des règles de composition d’un paysage. Devant certaines photos, il se veut sauvage, sans culture. À partir des photos qu’il aime, il essaie de formuler une philosophie. N’étant pas photographe, il n’a à sa disposition que deux expériences : celle du sujet regardé et celle du sujet regardant.

Ce qu’il aime, c’est le bruit mécanique du doigt du photographe sur l’appareil et non l’œil qui le terrifie. Par rapport à son personnage, l’image restituée est immobile, donc lourde, alors que lui se veut léger ; devant l’objectif, il est à la fois :

  • « celui qu’il se croit,
  • celui qu’il voudrait qu’on le croie,
  • celui que le photographe le croit,
  • celui dont il se sert pour exhiber son art ».

C’est pour cela qu’il a une sensation d’inauthenticité. Il devient objet. Il prend donc les photos qu’il aime pour analyse et dit qu’elles l’animent et qu’il les anime. C’est l’attrait qui les fait exister à sa vue. C’est leurs sentiments. Il aime les dualités, les personnages dissemblables, les scènes hétéroclites…

Il nomme deux éléments qui suscitent son admiration de la photo :

  • le studium (le goût pour quelqu’un ou quelque chose)
  • le punctum (la piqûre, un détail poignant)

Exemple : une famille noire américaine page 75 :

  • Le bon sujet culturel constitue le studium.
  • Un des personnages, bras croisés, porte une large ceinture. Ce détail fascine Barthes et constitue son punctum. Grâce à lui, un champ aveugle se crée (une sorte de hors-champ subtil), conférant à ce portrait une vie extérieure.

Il s’agit d’une co-présence. Sans ces deux éléments la photo lui est insignifiante.

« Une photo est surprenante lorsque l’on ne sait pas pourquoi elle a été prise. Une photo est subversive lorsqu’elle est pensive et non effrayante ». La photo le touche s’il lui retire son verbiage ordinaire : technique, réalité, reportage, art…

Jusqu’à ce stade, Roland Barthes a appris comment marche son désir mais n’a pas encore découvert la « nature » de la photographie. Elle a aussi un rapport avec la mort : la photo rend immobile tout sujet. Il découvre une photo de sa mère (après la mort de celle-ci) et se rend compte que l’amour et la mort interviennent dans son choix de photo unique, irremplaçable. Dans la photographie, il y a réalité et passé. Il a confondu vérité et réalité. Voilà désormais pour Barthes le Génie de la photographie, ce qui a été photographié « a existé » !

Il n’aime pas la couleur en photographie car il a l’impression qu’elle s’interpose entre le sujet et lui. Il parle des rayons qui émanent du sujet photographié comme s’ils étaient toujours vivants.

La photographie étonne Roland Barthes comme si elle avait le pouvoir de faire revivre ce qui a été. Elle n’invente pas (comme peut le faire tout autre langage), « elle est l’authentification même » (page 135). « Ce qu’on voit sur le papier est aussi sûr que ce qu’on touche » (page 136), mais la photographie ne sait dire ce qu’elle donne à voir (page 156). La photographie est violente (page 143) car elle emplit de force la vue. Elle est périssable (comme du papier) : elle naît comme tout organisme vivant à même les grains d’argent qui germent, s’épanouit puis vieillit.

Selon Barthes, l’amateur se tient au plus près de la photographie. Le noème (objet intentionnel de la pensée, pour la phénoménologie) de la photographie est simple : « ça a été » (page 176). La folie naît dans la photographie si l’on entre en extase devant elle. Sage ou folle, ce sont les deux voies que Roland Barthes se donne à choisir.

L’expression qui donne son titre à l’ouvrage se réfère à une théorie linguistique selon laquelle une opposition signifiante peut être “neutralisée” par un troisième terme appelé “degré zéro”. Barthes utilise métaphoriquement cette théorie : il y voit la possibilité de déjouer les assignations fixées par un code. Il donnera à cet usage d’un terme “neutre”, tout au cours de son Å“uvre, des développements considérables.

Dans ce premier ouvrage, la métaphore linguistique éclaire une pratique romanesque dont l’exemple privilégié est L’Étranger d’Albert Camus: « La nouvelle écriture neutre se place au milieu de ces cris et de ces jugements, sans participer à aucun d’eux ; elle est faite précisément de leur absence. » Si Barthes prend position dans la situation idéologique et esthétique de son temps, il affiche aussi une ambition plus large. Son ouvrage vise à réécrire l’histoire de la littérature comme une histoire des “formes de l’écriture”. Il commence par poser deux réalités stables : la “langue”, collective et archaïque ; et le “style”, individuel et quasi physiologique. L’écrivain ne fait le choix que des marques supplémentaires qu’il leur ajoute, et qui témoignent de son insertion dans l’Histoire et dans la société.

La première partie de l’essai est consacrée à l’analyse de divers modes d’écriture. Le mode politique donne lieu à des pages brillantes, souvent polémiques, sur l’écriture révolutionnaire, l’écriture bourgeoise, marxiste ou intellectuelle. Ce sont autant de “mythologies” de la forme écrite, où est dénoncée la fausseté des rapports entre le langage et le monde, dès qu’une médiation s’y agrège de manière parasite.

“L’écriture du roman” est décrite comme la fabrication d’une fausse évidence qui masque l’absence de réalité sous une fabulation crédible. Barthes s’attache à deux conventions du roman : le passé simple et la 3e personne. La poésie, quant à elle, et particulièrement la poésie moderne, échapperait au jeu des masques de l'”écriture”. Elle ne serait que langue et style; à travers elle, “l’homme affronte le monde objectif sans passer par aucune des figures de l’Histoire ou de la sociabilité.

La seconde partie de l’ouvrage développe l’histoire de l’écriture. Barthes montre la naissance d’une mauvaise conscience de l’écrivain, voire d’un tragique de la littérature dans la France du XIXe siècle. Flaubert en serait l’exemple privilégié. Après lui, la littérature n’aurait pu choisir qu’entre l’exhibition de son propre masque (“Je suis littérature”, proclame le roman naturaliste, tout en prétendant dire le réel) et le sabordage, le silence d’un Rimbaud ou d’un Mallarmé. Dans cette situation, le “degré zéro” apparaît comme une innocence reconquise.

Barthes entrevoit chez certains écrivains de son temps l’utopie d’une réconciliation entre la littérature et le monde, au-delà d’une société qui demeure irréconciliée.

Gérard Genette, né en 1930 à Paris, est un critique littéraire et théoricien de la littérature qui a construit sa propre démarche au sein de la poétique à partir du structuralisme.

près ses classes préparatoires au Lycée Lakanal, il intègre l’École normale supérieure, obtient l’agrégation de lettres et enseigne en hypokhâgne au Mans (en même temps que son condisciple de la rue d’Ulm, Jacques Derrida). De 1963 à 1967, il est assistant de Marie-Jeanne Durry à la Sorbonne où il dirige les travaux pratiques des étudiants qui suivent le cours magistral de Durry. Ensuite, grâce à Roland Barthes, il est nommé à l’École pratique des hautes études. Il restera comme directeur d’études, puis directeur de recherches à l’École des hautes études en sciences sociales jusqu’à sa retraite en 1994. Il a été aussi visiting professor à l’Université Yale, en 1969.

Il a fondé, en 1970, avec Tzvetan Todorov la revue Poétique et dirige la collection du même nom aux éditions du Seuil, collection spécialisée en théorie littéraire. Avec Henri Mitterand, il était un des premiers à soutenir une thèse d’État sur travaux (en l’occurrence Figures I-III), en 1972, à l’Université Paris IV-Sorbonne.

Gérard Genette a joué et continue de jouer un rôle fondamental dans l’avancée des études formelles de la littérature. Il est l’un des représentants les plus importants de la « nouvelle critique » dans les années 1960, et poursuit depuis l’entreprise théorique amorcée alors autour de Roland Barthes.

Au travers de nombreux essais, il a étudié le sens du discours, les aspects du langage, ses origines et ses mécanismes, grâce aux moyens qu’offre la critique, en regard de ceux que peut proposer le structuralisme. Dans les trois premiers tomes de Figures (1966-1972), puis dans Nouveau Discours du récit (1983), il explore les divers aspects d’une science du narratif qu’il tente de mettre en place, la « narratologie ». Il se penche également sur la classification des genres dans Introduction à l’architexte (1979), et sur la transtextualité — les rapports des textes les uns envers les autres — dans Palimpsestes (1982). Avec Seuils (1987), il s’intéresse à l’entour du texte, à tout ce qui l’accompagne et le fait exister en tant qu’objet accessible, la présentation éditoriale et les divers textes de commentaire, le paratexte. Au cours des années 1990, sa réflexion s’élargit à l’esthétique dans les deux volumes de L’Å’uvre de l’art, qui reprend et discute en ce domaine les propositions de l’esthétique analytique de Nelson Goodman et Arthur Danto.

Gérard Genette a été membre du groupe Socialisme ou barbarie. Il est marié à Raymonde Debray Genette, elle aussi enseignante et chercheuse littéraire.

Concepts inventés ou développés par Gérard Genette [modifier]

Transtextualité [modifier]

La transtextualité est un concept que Genette a développé, plus particulièrement, dans son livre Palimpsestes. Grossièrement, la transtextualité se définit par tout ce qui met un texte en relation, manifeste ou secrète, avec un autre texte.

Article détaillé : Transtextualité.

Termes définis dans Figures III [modifier]

Å’uvre considérable dans l’évolution de la narratologie, mais plus largement de la poétique (littéraire), Figures III semble poser les bases d’une analyse littéraire aussi précise qu’essentielle. À travers son Å“uvre, Gérard Genette définit des termes clés de l’analyse narratologique. A cela s’ajoutent évidemment des termes venant des analyses de Franz Karl Stanzel ou encore de Tzvetan Todorov.

  • Diégèse (Diegesis pour l’analyse en anglais)

« La diégèse est l’univers spatio-temporel désigné par le récit. »[1]

Cette notion est évidemment centrale, puisque tout l’acte de narration se trouve lié à la diégèse. Cet univers purement littéraire, autant que l’est le narrateur, constitue l’essence même de l’histoire qui sera racontée, ou narrée, par l’instance narrative.

  • Métalepse (Metalepsis pour l’analyse en anglais)

Deux éléments sont nécessaires pour qu’une métalepse puisse s’établir; pour être plus précis, deux diégèses doivent être requises. Soit une instance narrative en train de raconter sa propre histoire avec ses personnages. Un de ses personnages (appartenant à la diégèse dite numéro 1 ou de niveau supérieur) raconte alors une autre histoire, créant ainsi une seconde diégèse (ou une diégèse de niveau 2 ou de niveau inférieur). Dans ces conditions-ci, le passage d’une diégèse à une autre, d’un niveau narratif à un autre, d’un monde fictif à un autre, constitue alors une métalepse.

Plusieurs moyens sont possibles pour passer d’un univers spatio-temporel à un autre (différent). Par exemple, un narrateur peut nous amener à passer d’une diégèse à une autre par l’intermédiaire, par exemple, d’une lettre. Ainsi un personnage (ou personnage-narrateur) lira une lettre, créant simultanément un autre univers spatio-temporel, totalement différent de celui dans lequel le personnage se situe lorsqu’il lit la lettre.

Pour continuer dans la définition des termes introduits dans Figures III, deux critères permettent de définir précisément le statut du narrateur. Le premier correspond à la relation du narrateur à l’histoire, permettant d’opposer les termes de « hétérodiégétique » et « homodiégétique » (ou « autodiégétique » si tel est le cas); pour le second critère, il s’agit du niveau narratif du narrateur. Cette dernière distinction met en exergue les termes de « extradiégétique » et « intradiégétique ».

  • Hétérodiégétique
  • Homodiégétique
  • Autodiégétique
  • Extradiégétique
  • Intradiégétique

Å’uvres [modifier]

  • Figures, essais, 1966 sqq.
    • Figures I, Éditions du Seuil, collection Tel Quel, Paris, 1966, 269 pages.
    • Figures II, Éditions du Seuil, collection Tel Quel, Paris, 1969, 293 pages.
    • Figures III, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 1972, 285 pages. Cf. infra Discours du récit.
    • Figures IV, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 1999, 364 pages.
    • Figures V, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 2002, 352 pages.
  • Mimologiques : voyage en Cratylie, collection Poétique, Éditions du Seuil, Paris, 1976, 427 pages.
  • Introduction à l’architexte, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 1979, 89 pages. Cf. infra Fiction et diction.
  • Palimpsestes, La littérature au second degré, Éditions du Seuil, collection Essais, Paris, 1982, 561 pages.
  • Nouveau discours du récit, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 1983, 118 pages.
    • Discours du récit, Editions du Seuil, collection Points Essais, Paris, 2007, 435 pages, réunit deux essais publiés auparavant, à savoir « Discours du récit » (Figures III, pp. 71-273 resp. 67-282 ) et Nouveau discours du récit.
  • Seuils, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 1987, 389 pages.
  • Fiction et diction, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 1991, 150 pages.
    • Fiction et diction est réédité avec L’introduction à l’architexte, Éditions du Seuil, collection Points Essais, 2004, 236 pages.
  • L’Å’uvre de l’art, 2 volumes :
    • 1 : immanence et transcendance, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 1994, 299 pages.
    • 2 : la relation esthétique, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 1997, 292 pages.
  • Métalepse, Éditions du Seuil, collection Poétique, Paris, 2004, 132 pages.
  • Bardadrac, Editions du Seuil, collection Fiction & Cie., Paris, 2006, 452 pages.
  • Codicille, Editions du Seuil, collection Fiction & Cie., Paris, 2009, 312 pages.

Liens externes [modifier]

Références [modifier]

  1. ↑ Figures III, Éditions du Seuil, Paris, 1972; page 280.

2.      nvestigations philosophiques (Philosophische Untersuchungen) est un ouvrage de Ludwig Wittgenstein publiée à titre posthume en 1953. L’auteur travailla sur ce livre pendant de nombreuses années, et il fut « terminé » vers 1949. Avec le Tractatus logico-philosophicus, il est la seconde Å“uvre majeure de Wittgenstein.

3.      Aussi nommé Recherches philosophiques dans la dernière traduction française en date (2004), le livre a originellement été publié en allemand, puis traduit en anglais par Elizabeth Anscombe. Il traite principalement de sémantique et de la façon dont les confusions concernant l’usage du langage sont à l’origine de la plupart des problèmes philosophiques. Des questions sur la logique, la fondation des mathématiques et la nature de la conscience sont aussi abordées.

Méthode [modifier]

Cette Å“uvre est considérée comme remarquable par son approche de la philosophie, par l’utilisation d’expériences de pensée ; ce qui exige du lecteur une importante participation et l’effort de suivre le philosophe dans l’imagination de mondes différents pour éprouver les bornes de ceux-ci.

Les règles du langage [modifier]

Selon Wittgenstein, la plupart des problèmes de philosophie découlent de l’incapacité des philosophes à comprendre correctement les règles du langage (Regeln der Sprache). Quand un philosophe demande par exemple ce qu’est la beauté, il est convaincu qu’il doit exister quelque chose d’essentiel qui doit rendre un être beau. Or, il ne s’agit en réalité que d’une erreur suscitée par la forme grammaticale de la question qu’est-ce que… ? Ainsi Wittgenstein fait-il remarquer que nous n’avons pas besoin de comprendre ce qu’est l’essence de la beauté pour utiliser le mot « beauté » correctement ; la recherche de l’essence crée même des confusions sur la correction de l’usage d’un terme. Aussi, au lieu de chercher un substrat qui définisse le beau, Wittgenstein propose d’en trouver le sens dans notre usage réel du mot ; par exemple, en se demandant comment les enfants en apprennent l’utilisation.

Langage naturel, sens et usage [modifier]

Le principal argument de Wittgenstein est donc : Bedeutung ist der Gebrauch, la signification correcte est dans l’usage. Autrement dit, nous ne définissons pas les mots en nous référant aux choses, mais à la manière dont nous les utilisons. Il n’est donc pas nécessaire de supposer l’existence d’êtres indépendants de toutes les particularités des objets physiques.

Jeux de langage [modifier]

Le langage est un jeu « Qu’est-ce qu’un jeu ? ». Savoir ce que c’est est une question typiquement wittgensteinienne. Un jeu est une activité inter-humaine (même si on peut jouer tout seul). C’est une activité qui pragmatiquement fonctionne. Les jeux qui ne marchent pas, on ne peut pas y jouer. Un jeu fonctionne parce qu’il a été appris. On sait jouer lorsqu’on a appris. (processus d’apprentissage). Un jeu est quelque chose qui semble appliquer des règles, mais il n’y a pas forcément de règles (ex : le jeu des animaux, codé mais pas réglé). Le problème ce n’est pas de savoir s’il y a des règles ou non, mais de savoir si ces règles sont des règles descriptibles, qu’on pourrait expliquer. La notion de règles explicites est relativement floue.

Ainsi le langage fonctionne comme un jeu, et les questions qu’on se pose sur ses règles sont les mêmes. Les règles de la langue, nous les appliquons sans les avoir apprises : langue maternelle.

Pourquoi applique-t-on mieux les règles qu’on n’a pas apprises ? Ce n’est pas parce qu’on applique une règle qu’on la connaît.

Air de famille [modifier]

Langage privé [modifier]

Voir aussi [modifier]

Liens externes [modifier]

·         Umberto Eco (Italie, 1932) est un théoricien éclectique dont les travaux en sémiotique ont contribué à l’élaboration d’une philosophie de la signification et de l’interprétation. Journaliste, professeur, théoricien et romancier, Eco a étudié la pragmatique du texte et l’esthétique de la réception.

·         Les travaux de Eco mettent en place la théorisation d’une sémiotique générale, forme contemporaine d’une philosophie des divers langages, qu’ils soient parlés, écrits, scientifiques ou artistiques. Eco suggère de revoir la sémiotique en ses propres bases conceptuelles. Alors qu’on a surtout axé la réflexion sur la signification du signe, Eco s’intéressera aussi à son interprétation.

·         Le théoricien a pour postulat de base que le signe est plurivoque. Une œuvre, composée d’une infinité de signes, devient ainsi œuvre ouverte (L’œuvre ouverte, 1965), puisqu’elle offre une pluralité d’interprétations possibles. Le lecteur du texte doit mettre à profit son encyclopédie pour actualiser le message, sans pour autant surinterpréter les indices textuels présents (Interprétation et surinterprétation, 1992). Ce lecteur modèle (Lector in fabula, 1985) est en mesure de saisir la signification du texte en dégageant les modes de production et d’interprétation sémiotiques (La production des signes, 1992).

·         Umberto Eco est professeur à l’Université de Bologne en Italie; il est également président de l’International Center for Semiotic and Cognitive Studies.

·         L’Espace et le sujet : Inscription, Construction et Motivation

·        
Colloque international, 12-13 novembre 2011

Université d’Oran, Faculté des lettres, des langues et des Arts.
Université d’Oran – Sénia, Algérie

Argumentaire : Le laboratoire Créations d’outils pédagogiques en langues étrangères (Université d’Oran) organise un colloque sur le thème Espace et le sujet : Inscription, Construction et Motivation.

La notion d’espace repose la question du sujet dans une « épistémè » traditionnellement centrée sur la « présence » d’un objet fixe, observable en laboratoire. La relation de l’homme à son espace nous entraîne dans les sciences du virtuel, de l’inachevé, de la complexité, de l’émergence où les phénomènes ne sont pas déterminés. La pensée créatrice, l’émergence de la parole, le sentiment du sacré, le mythe, la littérature semblent être autant d’objets improbables ou impossibles pour les sciences expérimentales. Certes, l’espace existe par la langue et la parole qui le créent. Mais, l’espace est aussi physique, matériel, utopique et même métaphysique dont la représentation échappe à la seule clôture linguistique : ces espaces déterminent les croyances comme des variants, aux contours, sans cesse différents. Il est donc nécessaire que la pensée contemporaine s’ouvre sur de nouveaux horizons.

Ce colloque traitera aussi bien de la problématique linguistique et des sciences qui lui sont connexes que de la problématique littéraire.

Dans le domaine linguistique, la notion de « sujet » est au coeur de la linguistique de l’énonciation, mais aussi de la pragmatique, de la socio- et psycho-linguistique, où il s’agit de donner un statut théorique à la figure conceptualisante et conceptrice des « sujets parlants » dans un contexte de production et de compréhension (ou reconnaissance par un sujet dé-constructeur et re-constructeur d’espace variés) des énoncés prenant en compte les paramètres linguistiques et extralinguistiques dans l’interaction de l’activité langagière.

En littérature, on pourra s’intéresser à l’histoire théorique et critique du rapport du sujet à l’espace (l’écriture et la lecture ont-elles toujours été comprises comme des essentielles du sujet ?), mais aussi à la façon dont la littérature met en scène des opérations de construction de sujets : sujet-auteur, sujets-personnages ou narrateurs, sujets-lecteurs. Il s’agira alors de s’interroger sur la nature de cette construction, sur l’identité de ces sujets (collective ou singulière, psychologique, sociale, anthropologique …), sur la façon, enfin, dont la littérature crée un espace véritablement intersubjectif qui ne se résume pas à la juxtaposition de subjectivités, au retour sur soi ou à la reconnaissance du même.

A partir d’illustrations puisées dans les discours littéraires, linguistiques (sémiologie de la communication, énonciation politique et médiatiques, analyse conversationnelle, etc.) tenus par des acteurs parlant ou écrivant, le colloque s’articulera autour des axes suivants :

-La sémiologie littéraire permet de voir en quoi la littérature peut-elle contribuer à enrichir l’épistémologie des espaces ?

-La sémiologie de la communication permet aussi de réfléchir sur l’inscription du sujet dans l’espace urbain.

-Enonciation et espace : d’une part les langues naturelles utilisent différents moyens (lexicaux ou grammaticaux) pour exprimer les relations temporelles et spatiales. Les linguistes, ces moyens présentent une riche source de thématiques et de problèmes intéressants (par exemple la concordance des temps, l’aspect et l’aspectualité, etc.). D’autre part, le sujet s’inscrit dans un lieu promu aux configurations discursives.

-Géographie, littérature et espace : Quelles sont les relations entre l’espace représenté, littérarisé, et son référent (le « réalème », selon L. Dolezel) ? Quel est le statut de l’utopie dans le discours sur les espaces ? La littérature peut-elle « inventer » des espaces, et devenir elle-même un référent ?

-Histoire, littérature et espaces. Est-ce que la spécificité comparatiste s’exprime à travers une spatialisation de l’histoire littéraire ? En corollaire, l’étude des espaces est-elle le propre de certaines périodes littéraires ou de certains mouvements littéraires ?

-Emergence de nouveaux espaces et dialogue des phonies. L’abondance indique clairement que les espaces se multiplient en rapport avec les systèmes de représentation. Quel est aujourd’hui le statut des littératures qui se trouvaient à distance du centre : les littératures des espaces qui furent colonisés, les littératures émanant de cultures géographiques dites « périphériques » : au niveau du pays, au niveau de la région ? En quoi la décolonisation a-t-elle accéléré le processus de morcellement / diversification des espaces ?

-Enseignement/apprentissage et espaces. Un état de lieu des espaces universitaires s’impose. Il s’agit d’explorer l’espace social et universitaire des apprenants. Comment promouvoir l’espace d’un apprentissage multilingue. Quel est le rôle du manuel dans l’enseignement des langues étrangères à l’Université ?

-Mythes et espaces. Tout mythe s’inscrit dans l’espace. Mais est-il des mythes qui racontent la formation des espaces ? De ces mythes, lesquels ont aujourd’hui la préséance ? À mi-chemin entre le thème et le mythe, il est des agrégats mythoïdes qui élèvent au rang de mythe des espaces concrets ?

-Psychanalyse et espaces. L’espace décrit précédemment est perçu sous un angle essentiellement macroscopique. Qu’en est-il de la projection du corps dans l’espace ? Est-il aujourd’hui une topologie de l’intime ?

Ce colloque accueillera les communications venant de spécialistes de diverses disciplines des sciences humaines et sociales (littérature, linguistique, didactique appliquée, anthropologie, philosophie, histoire, sciences politiques, sciences de la communication).

Les propositions de communication (titre et résumé d’une quinzaine de lignes format RTF) sont à envoyer par courriel avant le 20 septembre 2008 à l’adresse suivante :

Lalaoui-Chiali Fatima-Zohra
MCF en sciences du langage, didactique, Sémiotique
6, rue patrice Lemumba
31000  Oran
Algérie

Tel 07 73 88 01 66
lalaoui_fz@netcourrier.com
chiali_fatzo@yahoo.fr

·         Exercices de style est l’un des ouvrages les plus célèbres de l’écrivain français Raymond Queneau. Paru en 1947, ce livre singulier raconte 99 fois la même histoire, de 99 façons différentes.

·         L’histoire elle-même tient en quelques mots. Le narrateur rencontre dans un bus un jeune homme au long cou, coiffé d’un chapeau orné d’une tresse tenant au lieu de ruban. Ce jeune homme échange quelques mots assez vifs avec un autre voyageur, puis va s’asseoir à une place devenue libre. Un peu plus tard, le narrateur revoit ce jeune homme qui est alors en train de discuter avec un ami. Celui-ci lui conseille de faire remonter le bouton supérieur de son pardessus.

Les Exercices de style sont un brillant exemple d’application d’une contrainte littéraire (écrire 99 fois la même histoire) en tant que moteur créatif et constituent à ce titre un texte précurseur du mouvement Oulipo dont Raymond Queneau sera l’un des fondateurs. La présence d’une deuxième contrainte (chaque version de l’histoire doit illustrer un genre stylistique bien particulier) apparaît à la lecture des titres des 99 versions de l’histoire :

Notations, En partie double, Litotes, Métaphoriquement, Rétrograde, Surprises, Rêve, Pronostications, Synchyses, L’arc-en-ciel, Logo-rallye, Hésitations, Précisions, Le côté subjectif, Autre subjectivité, Récit, Composition de mots, Négativités, Animiste, Anagrammes, Distinguo, Homéotéleutes, Lettre officielle, Prière d’insérer, Onomatopées, Analyse logique, Insistance, Ignorance, Passé indéfini, Présent, Passé simple, Imparfait, Alexandrins, Polyptotes, Aphérèses, Apocopes, Syncopes, Moi je, Exclamations, Alors, Ampoulé, Vulgaire, Interrogatoire, Comédie, Apartés, Paréchèses, Fantomatique, Philosophique, Apostrophe, Maladroit, Désinvolte, Partial, Sonnet, Olfactif, Gustatif, Tactile, Visuel, Auditif, Télégraphique, Ode, Permutations par groupes croissants de lettres, Permutations par groupes croissants de mots, Hellénismes, Ensembliste, Définitionnel, Tanka, Vers libres, Translation, Lipogramme, Anglicismes, Prosthèses, Épenthèses, Paragoges, Parties du discours, Métathèses, Par devant par derrière, Noms propres, Loucherbem, Javanais, Antonymique, Macaronique, Homophonique, Italianismes, Poor lay Zanglay, Contre-petteries, Botanique, Médical, Injurieux, Gastronomique, Zoologique, Impuissant, Modern style, Probabiliste, Portrait, Géométrique, Paysan, Interjections, Précieux, Inattendu.

Umberto Eco, qui a traduit les Exercices de style en italien, fait remarquer que Queneau détourne volontiers les valeurs esthétiques associées aux figures de rhétorique afin de pouvoir mener ses propres explorations parodiques et ludiques de la langue.[1] Eco observe aussi que l’acte de traduction, en introduisant une contrainte supplémentaire, fait naître un nouveau plaisir : « Je sais donc quel plaisir on éprouve à souffrir sur une phrase qui vous résiste, qu’il faut trahir en respectant les intentions de son auteur. »[2] Cette part faite au jeu et au plaisir a visiblement été goûtée par un large public et a valu aux Exercices de style une abondante postérité.